Né en Malaisie, CJ Lim s’installe en Angleterre en 1982 pour y poursuivre ses études d’architecture. Il fonde en 1994 Studio 8 Architects. Depuis 1993, il dirige un laboratoire de recherche à la Bartlett, University College de Londres, dirigée par Peter Cook. Enseignant, théoricien, chercheur, il donne de nombreuses conférences à travers le monde. En 2004, il est exposé au Pavillon anglais lors de la Biennale d’architecture de Venise. Lauréat de nombreux prix, ses dessins sont dans les collections du RIBA (Royal Institute of British Architects) ainsi que du Victoria & Albert Museum à Londres.
Cj Lim développe conjointement une activité intense d’édition, à ce jour, plus d’une douzaine de livres qu’il conçoit lui-même, ainsi Realms of Impossibility (2002) en 3 volumes, où la même histoire est racontée trois fois dans des contextes différents, air, terre et eau, tout comme la Guest House (1995), dans les collections du FRAC Centre, présentée à ArchiLab en 1999, raconte l’histoire d’une maison qui ne cesse de changer de forme, où la topographie s’est transmuée en architecture évolutive.
Influencé à ses débuts par la déconstruction et une certaine "architecture-machine", telle qu’elle a pu être élaborée par Neil Denari ou Wes Jones, Cj Lim invente des "fictions d’espace" où se multiplient "les événements insolites" (N. Labedade). L’architecture est une machine mais qui vit aussi comme un organisme vivant. Ainsi avons-nous une dualité sous-jacente dans les dessins extraordinaires de Cj Lim, qui rejoignent la grande lignée visionnaire de Jérome Bosch à Archigram, des Métabolistes japonais à Lebbeus Wood, de Hejduk à Denari: l’incision machinique du trait et son animation organique. Cinématiques, ses projets incorporent le mouvement, l’instabilité, la décomposition des formes en séquences sans début ni fin.
CJ Lim pratique une architecture de la métamorphose, tiraillée entre deux cultures, occidentale et extrême-orientale. Des territoires hybrides de végétations et de machines se sont constitués dans un univers anachronique, technologisé, mais aussi complètement naturalisé.
L’exposition au FRAC Centre présente dans sa version originale et inédite le projet, "Virtually Venice", pour le pavillon anglais à la Biennale de Venise en 2004. Dessins et maquettes y recréent un univers fictionnel à la manière des "villes invisibles" d’Italo Calvino ou du "Rivage des Syrtes" de Julien Gracq, mettant en scène un dialogue au 13e siècle entre l’empereur mongol, Kublai Khan et Marco Polo.
Si Kublai Khan contrôle la plupart des régions d’Extrême-Orient, c’est le marchand vénitien qui lui raconte leurs histoires.
Les dessins de Cj Lim nous montrent comment Kublai Khan a pu imaginer Venise d’après leurs conversations ; la cité lacustre y prend des contours orientaux qui reconfigurent ses formes architecturales, déclinées ici en 6 stations (Lido, Giardini, San Marco, etc). Ces fragments architecturaux sont ainsi constitués de sédiments de mémoires et de récits entremêlés, comme un Songe de Polyphile. L’installation des dessins et maquettes au FRAC Centre retranscrit à sa manière les flux de ces récits, les vagues narratives de ces architectures flottant entre remémoration et évaporation.
CJ LIM
Virtually Venice
Brochure éditée à l'occasion de l'exposition "CJ LIM - Virtually Venice" au FRAC Centre du 10 février au 23 avril 2006 36 pages, 16 x 11 cm