Etudiants chinois : nouveau coup dur pour l'image des universités[ 17/04/09 ]
Des soupçons de fraude pèsent sur la délivrance de diplômes universitaires à des étudiants étrangers à Toulon. D'autres universités pourraient être concernées. La venue en nombre d'étudiants chinois et leur mode de sélection est au centre du dossier.C'est une contre-publicité dont se seraient bien passées les universités, déjà à la peine pour tenter de sauver leurs diplômes et leur notoriété en cette année mouvementée. Selon une information dévoilée par le quotidien « Le Monde » et confirmée par un magistrat marseillais, plusieurs campus hexagonaux (Toulon, La Rochelle, Poitiers, Pau et un autre en région parisienne selon « Le Monde »), essentiellement des filières d'économie, pourraient être concernés par un trafic de diplômes au profit d'étudiants étrangers. L'université de Toulon est dans l'oeil du cyclone : une instruction judiciaire a été ouverte fin mars après qu'un professeur - rejoint hier par le syndicat étudiant Uni - a déposé plainte. Des étudiants chinois auraient obtenu moyennant finance un diplôme de l'Institut d'administration des entreprises (IAE), malgré un piètre niveau de français.
Test informatique piratéLe directeur de l'institut qui a avoué avoir été approché - en vain - par un étudiant chinois, s'est efforcé hier de limiter les dégâts, niant « tout système massif de corruption » et affirmant que la fraude ne concernerait pas plus de 130 diplômes (sur 11.000 étudiants à l'université).
Les trois autres universités se défendent, elles, d'avoir eu vent d'affaires similaires en interne, ou même de contacts avec la justice. Des démentis « formels » ont été publiés par les universités de La Rochelle, de Pau et de Poitiers. Le président de cette dernière, Jean-Pierre Gesson, également en charge des relations internationales au sein de la Conférence des présidents d'université, a dit n'avoir constaté aucun indice troublant au terme de son enquête interne. Mais « cette affaire risque d'être redoutable en termes d'image » pour les universités, regrette-t-il, reconnaissant toutefois que des améliorations pourraient être apportées dans le processus national de sélection des étudiants étrangers.
De fait, aucune université tricolore accueillant des Chinois ne peut affirmer à coup sûr avoir échappé aux dysfonctionnements cette année. Une fraude a été constatée au printemps au sein des centres d'études en France, rattachés à l'ambassade, qui sont chargés de vérifier le niveau de langue des candidats chinois aux départs. Le test informatique piraté a été depuis reformaté. A Toulon, l'IAE admet que 138 étudiants chinois ne parlaient pas correctement le français.
Compenser les baisses d'effectifsLes universités ne sont pas totalement exemptes de responsabilités non plus. Elles ont massivement ouvert leurs portes aux Chinois ces dernières années (22.452 en 2007, contre 2.000 en 1999). Et certaines se sont montrées peu regardantes pour compenser leurs baisses d'effectifs. Jusqu'à cette année, les dotations ministérielles étaient, en effet, allouées en fonction du nombre d'étudiants et non de leur taux de réussite. La réforme menée cet automne par Valérie Pécresse est censée atténuer cet effet pervers. La ministre de l'Enseignement supérieur s'est à la fois montrée prudente et désireuse de montrer qu'elle prend l'affaire très au sérieux. « Je crois et j'espère qu'il s'agit d'une pratique isolée (...), mais si j'ai le moindre soupçon j'étendrai la visite de l'inspection à toutes les universités concernées, a-t-elle prévenu sur RTL. Il n'est pas question qu'il puisse y avoir en France le moindre soupçon sur la valeur de nos diplômes. »