[size=0.9em]01 octobre 2014
Action de groupeLes recours collectifs sont désormais possibles en FranceJusqu’à aujourd’hui, lorsque plusieurs consommateurs étaient victimes d’un même manquement commis par un professionnel, ils pouvaient entamer des procédures individuelles, mais pas attaquer ensemble l’entreprise fautive. Le coût et la lourdeur d’un procès freinaient généralement les velléités de se défendre des citoyens. L’action de groupe va permettre de rééquilibrer le rapport de force entre consommateurs et professionnels. Le détail de ces nouvelles actions, en pratique.Vers qui m'adresser si je souhaite qu'une action de groupe soit engagée ?Si vous êtes victime d'un manquement de la part d’un professionnel - et que vous pensez que d’autres consommateurs peuvent être dans la même situation - vous devez vous adresser à une association de consommateurs agréée: UFC-Que Choisir, UNAF, CLCV, CNL... Quinze associations sont autorisées à entamer des actions de groupe. Il est impossible de lancer une action de groupe sans passer par l’une d’entre elles. Liste des associations agréées : CNAFAL, CNAFC, CSF, Familles de France, Familles rurales, UNAF, Adeic, AFOC, Indecosa-CGT, ALLDC, UFC-Que choisir, CLCV, CGL, CNL, Fnaut.
Combien faut-il être pour entamer une action de groupe ?Une action de groupe peut être lancée à partir du moment où au moins deux consommateurs estiment avoir subi un préjudice résultant du même manquement d'un professionnel . Il n’est pas nécessaire que vous trouviez un autre consommateur dans la même situation que vous pour vous adresser à une association de consommateurs. C’est cette dernière qui se charge de voir si plusieurs consommateurs sont concernés.
Après avoir prévenu l’association de consommateurs, que se passe-t-il ?L’association examine la réclamation et détermine si, à son sens, il existe effectivement un préjudice dont serait victime un groupe de consommateurs. Si c’est le cas, elle saisit le tribunal de grande instance compétent, par le biais de son avocat. Le tribunal vérifie si le professionnel a effectivement commis les manquements reprochés et s’ils ont été la cause de préjudices au détriment de plusieurs consommateurs. Si c'est le cas, le juge détermine quel est le groupe de consommateurs à indemniser (par exemple : tous les clients d’une société qui lui ont acheté tel produit entre telle et telle date) et fixe la somme que l'entreprise devra verser à chaque consommateur ou précise tous les éléments permettant l'évaluation de cette somme. Le juge indique aussi dans quel délai l’indemnisation des consommateurs doit intervenir. Le juge fixe en outre les mesures de publicité destinées aux consommateurs potentiellement concernés (voie de presse, courriel, affichage…), afin qu'ils se déclarent auprès du professionnel ou de l’association pour être indemnisés. Les consommateurs disposent d'un délai fixé par le juge, entre 2 et 6 mois, pour se manifester. Ces mesures de publicité ne peuvent être mises en œuvre qu'une fois que le premier jugement rendu ne peut être remis en cause par l'exercice des voies de recours. L'association se charge ensuite d'obtenir l'indemnisation des consommateurs concernés. En cas de contestations ou en l’absence d’indemnisation de certains consommateurs, le juge est à nouveau saisi, par le professionnel ou l’association.
Combien cela va-t-il me coûter ?Dans la très grande majorité des cas, rien du tout. Le fait de signaler des manquements commis par un professionnel à une association de consommateurs est gratuit. Ces dernières ne sont pas autorisées à exiger de vous une quelconque cotisation ou adhésion à leur structure pour prendre en compte votre demande. Au stade de l’indemnisation, si vous rentrez dans les critères, vous n’aurez rien à payer non plus. Le seul cas de figure dans lequel vous êtes susceptible d’avoir à payer des frais d’avocat est celui où vous demandez à être indemnisé, mais que le professionnel estime que vous ne rentrez pas dans les critères. A ce stade, vous pouvez soit décider d’en rester là (et être certain de n’avoir aucun frais à payer), soit préférer passer devant le juge pour qu’il détermine qui a raison. Si le magistrat estime que votre demande d’indemnisation est légitime, le professionnel prend en principe en charge les frais d’avocat, et cela ne vous coûte rien. En revanche, si le juge considère que votre cas ne répond pas aux critères d’indemnisation, et donc que le professionnel est dans son bon droit, vous risquez de devoir payer les frais d’avocats (ou, plus précisément, les rembourser à l’association qui intente l’action en justice en votre nom et avance systématiquement les frais.)
J’ai subi le même préjudice mais je n’ai pas participé à l’action en justice. J’ai le droit à quelque chose ?Oui, c’est le grand avantage de l’action de groupe. Vous n’avez pas besoin de prendre part aux démarches judiciaires initiales pour avoir le droit à l’indemnisation. Il vous suffit de vous manifester dans le temps imparti par le juge. Une fois la publicité du premier jugement faite, vous avez deux à six mois pour entrer en contact avec le professionnel ou l’association de consommateurs (le délai et l’interlocuteur auquel vous adresser sont précisés dans la publicité). Si vous respectez les délais et que vous remplissez les critères déterminés par le juge, vous serez indemnisé. Par ailleurs, lorsque le juge a un moyen de savoir que vous faites partie d'un groupe de consommateurs lésés (abonnement, carte de fidélité), et que le montant des préjudices est identique, il peut condamner le professionnel à vous indemniser directement et individuellement. Les victimes d’un médicament défectueux vont pouvoir entamer une action de groupe ?Non. Pour le moment, il est seulement possible de lancer une action de groupe pour réparer un préjudice matériel, et ce exclusivement pour des litiges relevant de la consommation ou de la concurrence. Une action de groupe peut par exemple avoir lieu dans le cas de frais bancaires injustifiés, de viande de cheval dans un produit garanti 100% bœuf ou de tarifs abusifs de la part d’un opérateur mobile. Dans le cas d’une marée noire, de prothèses mammaires défaillantes, de transfusion de sang contaminé ou d’un médicament aux effets secondaires imprévus, ce type d’action n’est pas envisageable. En effet, lorsqu’il s’agit de préjudices moraux ou corporels, de questions environnementales ou de santé publique, seuls les recours individuels sont possibles. Il est toutefois envisagé d'étendre l’action de groupe à d’autres domaines.
Je vais pouvoir gagner plusieurs millions d’euros en attaquant une grande entreprise en justice ?Non. L’objectif de l’action de groupe est de réparer un préjudice matériel et seulement de réparer celui-ci. Aucune indemnité pour « punir » l’entreprise n’est prévue dans ce type de procédure. Le montant de la compensation fixée par le juge correspond à l'euro près au préjudice économique subi.
Il est indiqué dans mon contrat que je n’ai pas le droit de participer à une action de groupe. Que faire ?Ce type de clause n’a aucune valeur juridique. L’article L.423-25 du Code de la consommation prévoit que « toute clause ayant pour objet ou effet d’interdire à un consommateur de participer à une action de groupe » est réputée non écrite. Que cette clause interdise l’action de groupe ou en limite la possibilité - en indiquant par exemple des seuils de préjudice - elle ne vous engage en rien. Vous avez le droit de contacter une association de consommateurs pour initier une action de groupe.
Une procédure venant compléter l’action de l’Autorité de la concurrence.[size=1em]Jusqu’ici, lorsqu’une société était condamnée pour non-respect de la concurrence, elle payait son amende mais conservait la plus-value obtenue grâce à la pratique abusive. Avec l’action de groupe, ce ne sera plus le cas, puisqu’elle devra rembourser les consommateurs abusés.
Si une action de groupe est entamée, un accord à l’amiable avec l’entreprise n’est plus possible?La médiation est toujours possible, même lorsque l’action de groupe est entamée. Toutefois, il ne s’agira pas d’accords individuels, mais d’un accord global pour toutes les personnes concernées par l’affaire. Comme pour le procès, c’est l’association de consommateurs agréée qui s’en charge. Qui va me verser les indemnités si on gagne ?Selon l’affaire, ce sera soit directement le professionnel, soit l’association de consommateurs, soit un mandataire judiciaire. Dans les deux derniers cas, le professionnel aura versé sur un compte le montant global de la réparation. L’association ou le mandataire est alors chargé de répartir l’argent entre les consommateurs concernés.
Les actions de groupe, c’est la même chose que les « class action » américaines ?Pas tout à fait. D’abord, en France, il n’y a pas d’indemnité punitive. Pas de millions à la clé du procès : le consommateur est restauré dans la situation dans laquelle il était avant le manquement, pas plus. Ensuite, seuls les préjudices matériels, de grande consommation ou en lien avec la concurrence sont concernés. Une « class action » sur une problématique d’eau contaminée comme on en voit dans les films américains serait donc impossible chez nous. Pour finir, seules les associations de consommateurs sont autorisées à mener des actions de groupe.
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