Un expert français Pierre Picquart sur les émeutes du Tibet
PARIS, 24 mars (Xinhua)-- “En cas de trouble lié à la sécurité des biens et des personnes, chaque Etat a la légitimité, le droit, la raison mais aussi le devoir de defendre rapidement la sécurité de la population dans son ensemle”, a déclaré lundi Pierre Picquart, docteur en géopolitique de l’Université de Paris-VIII, également spécialiste de la Chine et du monde chinois.
Il s'est exprimé ainsi dans une interview exclusive accordée à Xinhua, en réponse à la question sur l’intervention de l’Etat chinois pour rétablir l'ordre face aux émeutes survenus au Tibet en Chine.
"Pour revenir aux manifestations et aux troubles violents récents dans la région du Tibet, il semble clairement que l’on est, au départ, dans le cadre d’actions volontaires de violence gratuites qui visaient très directement des Chinois Han commerçant, des civils chinois et d’autres ethnies par des groupes qui s’attaquaient à des gens innocents”, a indiqué M. Picquart.
Le sinologue s’est déclaré très étonné et pris à court par les images d'émeutiers: des jeunes chinois innocents sont attaquées, des personnes âgées sont tabassées très violemment….sans aucune raison.
“Il y a eu sans doute une tentative de déstabilisation. donc, une émeute ponctuelle? une programmation? l’avenir le dira, mais a priori, on peut le penser, de la part d’un groupe très violent à Lhassa qui voulait en débattre”, a-t-il analysé.
Aucun Etat ne peut laisser des civils innocents attaquées et des boutiques brûlées, car dans l’intérêt de tous, le retour au calme est nécessaire, de même que la protection des biens et des personnes, a ajouté M.Picquart, estimant que pour la Chine, cela semble néanmoins être le point le plus délicat au regard des médias étrangers.
“ les exploitation, sans dicernement, de ces manifestations au Tibet pourrait faire réapparaître tous les vieux clichés sur la Chine, sans faire la part des choses et sans rappeler les faits d’origine”, a dit ce specialiste, ajoutant que concernant les émeutes, majoritairement les médias occidentaux ont dans un premier temps retenu plus les accusations et les positions du gouvernement exile plutôt que l’impact des attaques contre les civils.
D’apres lui, les critiques faites ainsi par des médias occidentaux contre l’Etat chinois sont sans preuve. “Les médias occidentaux ont souvent considéré globalement certes avec intérêt, mais aussi avec doute et suspicion, la communication des divers régimes communistes ou des républiques populaires”, a-t-il commenté.
Pas mal des médias occidentaux ne connaissent pas bien la Chine, sans parler le Tibet, selon M. Picquart, qui a proposé aux médias occidentaux de dissocier les problématiques, enquêter réellement, avoir une réflexion globale, de recul, et de regarder la société chinoise.
Il s'est prononcé contre le terme “colonisation” utilisé souvent par les médias occidentaux au sujet du Tibet. Cela résulte d’une ignorance de l’histoire du Tibet où régnait la plus grande misère, l’humiliation, la théocratie et le servage, a expliqué Dr. Picquart, qui préfère personnellement “les termes du progres, de la tolérence, de la construction économique, sociale et culture”.
“De plus, sur le terrain, depuis ces dernières décennies, on constate en Chine un respect renforcé envers les divers courants spirituels, les pratiques religieuses: bibles dans les hôtels, lieux de prière respectés, comme dans les lieux sacrés du bouddhisme ou autres, où les Chinois et les autres personnes peuvent exercer leur foi de plus en plus librement. Les nombreuses ethnies en Chine bénéficient plus de droits et d’autonomies que les chinois d’ethnie Han, tels que le nombre d’enfants, au regard de leurs particularités culturelles”, a-t-il ajoute.
Selon Pierre Picquart, la Chine, en s’ouvrant au monde, apprend maintenant à mieux communiquer. “Mais, comme le pays était auparavant pendant longtemps fermée sur elle-même, il lui reste encore un problème de communication et un doute de la part des médias occidentaux”, a-t-il indiqué.
Les discours s’avèrent parfois encore dogmatiques et “a sens unique”, et que les messages reçus sont jugés parfois comme relevant de la propagande ou du slogan, plutot que de la communication, a-t-il dit.
En ce qui concerne l’idée du boycotte des J.O. de Beijing parue à la Une de la presse occidentale, Pierre Picquart s’y oppose avec fermeté.
"Ce ne serait pas l’esprit de l’Olympisme et celui du baron Pierre de Coubertin. Jeux Olympiques sont une grande fête de fraternité et je suis choqué de voir que l’on compare les Jeux de Beijing aux Jeux de Berlin (de 1936). Le boycotte des Jeux Olimpiques ne fonctionne pas. Il ne peut servir qu’à ceux qui souhaitent des divisions", a-t-il indiqué.
"Les Jeux Olympiques de Beijing représentent pour la Chine et pour tout le peuple chinois une fierté légitime, un enjeu géopolitique majeur et un défi de communication positive sur la nouvelle Chine", a expliqué M. Picquart.
Via les jeux Olympique unis et rayonnants, la Chine va se présenter au monde entier, montrer une riche tradition millénaire, une modernité incontestable et de nombreuses réformes économiques, culturelles, scientifiques, politiques en cours ou engagées depuis plusieurs années, y compris en faveur des plus pauvres, des libertés individuelles et des éthnies minoritaires, a-t-il dit.
Pierre Picquart a également exprimé son optimisme et sa confiance vis-à-vis de la construction de démocratie en Chine.
"La démocratie et la répartition des richesses vont de pair. Comment parler de démocratie si un peuple vit dans la misère? Aujourd’hui, la Chine a su bâtir une société plus juste et un revenu moyen de plus en plus acceptable pour une grande partie de la population", a-t-il indiqué.
La démocratie chinoise ne sera pas comparable aux modèles occidentaux et demain il y pourrait avoir un modèle démocratique à la chinoise, a-t-il dit.
Pierre Picquart, auteur des livres "l’Empire Chinois" et "La Forme Olympique de la Chine", a souligné notamment que l’on ne devrait pas oublier les côtés très positifs de la nouvelle Chine-et-de-la-société-chnioise.
"Nul pays n’est parfait, la Chine fait au mieux, comme d’autres nations dans son propre processus d’évolution, et doit gérer encore de nombreux problèmes au regard d’une population supérieure à plus de 1,3 milliards d’habitants, a rappelé M. Picquart, et d’ajouté : "Ce qui compte, à mes-yeux, c’est-son-évolution et son désir d’ouverture au monde".
Beaucoup de gens critiquent la Chine à tous propos en faisant des amalgames ou ont une vision imcomplète, ce qui montre leur méconnaissance du terrain, a encore rappelé M.Picquart.
"Ces gens-là devront voir de leurs propres yeux comment la Chine est en train de se transformer dans tous les domaines", a conclu M. Picquart, qui reste convaincu que "l’opinion générale changera, comme la chine change positivement". Fin