Dans son livre Le Monde selon K. (Fayard) qui paraît mercredi 4 février, le journaliste-écrivain Pierre Péan accuse l'actuel ministre des affaires étrangères, Bernard Kouchner, d'avoir mélangé les genres entre activités publiques et privées en Afrique. Le ministre des affaires étrangères a été sommé mardi par des responsables politiques de s'expliquer.
Ce dernier riposte mercredi dans un entretien sur le site du Nouvel Observateur. Il déclare notamment : "Je n'ai jamais signé un seul contrat avec un Etat africain. Jamais. J'ai été un des consultants d'une entreprise française – Imeda – dans un domaine que je connais : celui de la médecine et de la santé publique." "Y a-t-il quelque chose de choquant qu'un ancien ministre de la santé, qui a fait pendant des dizaines d'années des missions humanitaires pour Médecins sans Frontière - Prix Nobel de la Paix je le rappelle -, Médecins du Monde et bien d'autres sans toucher un centime, rédige des rapports permettant à des pays africains d'améliorer leur système de santé ?", souligne Bernard Kouchner qui ajoute "j'ai toujours agi dans la légalité et la transparence, déclaré mes revenus, payé mes impôts". Il dénonce par ailleurs "une attaque grotesque et nauséabonde".
Selon son entourage, Bernard Kouchner "n'a pas mis d'argent dans sa poche" et les accusations sur les contrats africains "ne s'appuient sur rien". L'avocat du ministre, Me Georges Kiejman, a annoncé sur France Info mercredi son intention d'engager des poursuites judiciaires.
* Les nombreuses réactions dans la classe politique
Le chef de file des députés UMP, Jean-François Copé, a estimé mercredi qu'"il appartient évidemment à Bernard Kouchner de s'expliquer". "On vit dans une société où on jette très facilement des responsables publics aux piranhas sur la base d'un certain nombre d'allégations, d'affirmations, donc je crois que c'est bien que Bernard Kouchner puisse répondre à tout cela, et puis on verra ce qu'il en est."
S'exprimant sur Europe 1, Eric Besson, lui-même transfuge du PS, a déclaré "je connais Bernard Kouchner et je sais que ce n'est pas un homme d'argent". "S'il l'avait été, il aurait mené une autre carrière. C'est un homme de causes et de missions. Mon présupposé c'est que c'est un honnête homme."
Bernard Accoyer (UMP) a invité à rester "calme". "Tout va dépendre des réponses qui seront faites par Bernard Kouchner, c'est à partir de là que l'on pourra dire s'il s'agit d'un dossier qui justifie telle ou telle réponse, telle ou telle attitude", a-t-il souligné.
Xavier Bertrand (UMP) a pris la défense de Bernard Kouchner. "Je n'ai pas pas lu ce livre" mais "ce que j'en retiens, ce que je sais, c'est que c'est un livre à charge, très critique", a déclaré le secrétairé général de l'UMP sur LCI. "Ce que je vois surtout, c'est que des socialistes ont décidé de régler leurs comptes avec Bernard Kouchner", ministre d'ouverture, et qu'"il y a chez eux beaucoup d'esprit de revanche à l'égard de Bernard Kouchner, le socialiste le plus populaire".
La secrétaire du PS, Martine Aubry, a déclaré mardi à la presse : "Je ne dirai pas un mot de désagréable sur [Bernard Kouchner], sur cette affaire, dont je ne connais rien, et que je préfère ne pas croire, parce que je ne la crois pas." "Vous n'entendrez pas un mot de ma part sur ce livre," a insisté la maire de Lille.
"Quand on aura vraiment lu le livre, on posera une question de façon vraiment pertinente, assure Jean-Marc Ayrault, le président du groupe socialiste à l'Assemblée. On ne laissera pas passer cette affaire." L'opposition socialiste envisage d'interpeller le gouvernement à l'Assemblée.
Plus sévère, le député PS Arnaud Montebourg a déclaré dans un entretien sur le site Marianne2 : "Ça me paraît problématique qu'un ministre ait reçu de l'argent de chefs d'Etat africains dont la réputation est contestable sur le plan des droits de l'homme. (...) Si Bernard Kouchner a encore un honneur, il doit enfin s'expliquer sérieusement."
Pour Pierre Moscovici, interrogé mercredi matin sur RFI, c'est "le ministre qui a le devoir de s'expliquer".
Le député Vert de Paris Yves Cochet a invité Bernard Kouchner à s'expliquer devant la commission des affaires étrangères de l'Assemblée.