I. l'analyse du mode de production capitaliste et la critique de l'économie politique.
Economie politique et critique de l'économie politique.
On peut observer que presque tous les écrits de Marx portent comme titres ou comme sous-titres "critique de l'économie politique". Selon Marx, la critique de l'économie politique n'a pas pour objet de remplacer l'économie politique existante par une autre économie politique qui serait, par exemple, une économie politique marxiste.
Il s'agit au contraire de rompre avec toute économie politique au sens où il s'agit de mettre en question les présupposés de toute économie politique. Or, ce qui caractérise l'économie politique, au-delà de la diversité de ses théories, c'est qu'elle traite les concepts de l'économie tels que la marchandise, la monnaie, la valeur d'échange, le capital, le profit, le salaire,...
L'économie politique traite ces concepts économiques comme des données naturelles, c'est-à-dire des choses qui ont toujours existé et dont l'existence n'a pas besoin d'être expliquée.
La conception critique de Marx consiste au contraire à traiter tous ces concepts politique comme des problèmes, c'est-à-dire à s'interroger sur leur existence.
Autrement dit, Marx pose la question du caractère historique des concepts économiques.
Parler du caractère historique d'un concept, c'est dire qu'il est lié à un type de société déterminé, qu'il n'a donc pas toujours existé et qu'il n'existera pas nécessairement toujours.
On a, d'une part, l'économie politique qui part du principe que l'économie obéit à des lois issues de la nature s'imposant à toute société, c'est-à-dire des lois qui sont indépendantes de l'histoire des sociétés.
On a, d'autre part, la critique de l'économie politique qui part du principe que les lois établies par l'économie politique, sont des lois historiques c'est-à-dire spécifiques à la société capitaliste dans laquelle nous vivons.
Les lois économiques sont-elles des lois naturelles ou historiques ?
L'enjeu de la question est primordial puisque, selon la réponse, la pratique qui en découle est complètement différente. En effet, si on considère, comme le fait l'économie politique, que l'économie obéit à des lois naturelles, cela signifie qu'il s'agit de lois universelles et éternelles que les hommes ne peuvent changer. Tout ce que peuvent faire les hommes, c'est écarter les limites du fonctionnement naturel de ces lois, d'où les mots d'ordre de l'économie politique : libre-échange, libre concurrence,...
Mais, si on considère, comme le fait Marx, que les lois économiques sont des lois historiques et spécifiques au capitalisme, il s'ensuit alors que les hommes peuvent changer ces lois, c'est-à-dire que la société peut être transformée et qu'une autre société que la société capitaliste est possible. Cela aboutit la reconnaissance des luttes sociales comme moteur de l'histoire et de la transformation de l'économie. Autrement dit, c'est le rejet de l'économisme, c'est-à-dire de l'idée qui assimile l'économie à un mécanisme automatique dans son fonctionnement et qui rend l'économie indépendante du politique. Au contraire de l'économisme, l'analyse marxiste affirme que l'économie est politique.
B. Mode de production, rapport de production et force productive.
Pour Marx, tout phénomène économique présente obligatoirement un double aspect que Marx appelle "l'aspect rapport de société de production" et "l'aspect force productive.
Pour Marx, les rapports de société de production, sont les rapports qui s'établissent entre les hommes dans la production des conditions matérielles de leur existence. C'est un rapport social dans la mesure où il s'agit d'un rapport des hommes entre eux dans la société, qui s'établit à travers la possession ou non des moyens de production.
Les forces productives désignent aussi un rapport : il s'agit de la relation technique de l'individu au moyen de production. Par opposition aux rapports sociaux de production, les forces productives constituent"le rapport technique de production". Autrement dit, si les rapports sociaux désignent un rapport hommes-hommes, les forces productives, quant à elles, désignent le rapport hommes-nature (tout ce qui est extérieur à l'homme).
Le développement des forces productives traduit le degré de maîtrise de l'homme sur la nature, ou encore ce que l'on appelle le niveau de développement de la productivité du travail humain.
L'unité constituée par les rapports sociaux de production et les forces productives, constitue le mode de production.
Dans le mode de production, c'est le rapport social de production qui est déterminant, au sens où c'est la nature du rapport social de production qui caractérise le mode de production. Par exemple, le salariat, c'est-à-dire le rapport entre les travailleurs salariés et le capitaliste, caractérise le mode de production dit capitaliste. De même, ce que l'on appelle le servage (relation entre les serfs et le Seigneur) caractérise le mode de production féodal, ou encore, ce que l'on appelle l'esclavage (relation entre l'esclave et le maître) caractérise le mode de production antique ou esclavagiste.
L'unité entre le rapport social de production et les forces de production dans le mode de production signifie qu'il n'y a pas de force productive sans rapport social de production, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de rapport de l'homme à la nature sans rapport des hommes entre eux.
La seule exception est le cas de Robinson Crusoé, qui vit seul sur son île avant l'arrivée de Vendredi. À partir de l'arrivée de Vendredi, le rapport de l'homme à la nature est aussi un rapport des hommes entre eux.
On peut dire que le rapport social de production n'existe pas indépendamment des forces productives, c'est-à-dire que les rapports sociaux de production se matérialisent toujours dans des forces productives, de sorte que l'on peut définir le rapport social de production comme étant le rapport qui s'établit entre les hommes dans la mise en oeuvre des forces productives.
Toute l'oeuvre de Marx s'est consacrée à l'analyse d'un rapport social de production historique déterminé, à savoir le capital ou encore le salariat. En effet, pour Marx, le capital n'est pas une chose, ce n'est pas une somme d'argent, ni un moyen de production mais c'est un rapport social entre capitaliste et salariés. Marx définit le capital comme un rapport social d'exploitation. Par exploitation, on désigne l'appropriation par une classe sociale du sur-travail, ou encore du sur-produit d'une autre classe.
Le sur-travail, désigne le travail qui se trouve dépensé au-delà de ce qui est nécessaire à la reproduction de la classe de travailleurs.
De même, le sur-produit désigne l'excédent de ce que produit la classe de travailleurs par rapport à ce qui est nécessaire à sa reproduction.
Le salariat, le servage ou encore l'esclavage sont des rapports d'exploitation. L'exploitation dite capitaliste se caractérise par le fait qu'elle est l'exploitation du sur-produit sous forme monétaire ou sous forme de valeur. Il s'agit de prélèvements du sur-travail au travers des rapports d'échange, de rapports marchands.
Ce qui différencie le servage, où l'esclavage, du salariat, c'est que dans le servage comme dans l'esclavage, le sur-travail est prélevé sous forme de produits physiques et à travers des rapports de dépendance personnelle.
II. Le rapport marchand.
Parce que la forme monétaire spécifie le capital comme rapport d'exploitation, la valeur va constituer le point de départ de l'analyse du capital chez Marx.
Cette analyse de la valeur doit répondre à deux questions :
- pourquoi la valeur existe-t-elle ? C'est la question de l'existence de la valeur à laquelle Marx répond par la construction du concept du travail abstrait.
- comment la valeur se manifeste-t-elle ? C'est la question de l'expression de la valeur à laquelle Marx répond par la construction du concept de la monnaie.
A. La valeur comme forme sociale et le concept du travail abstrait.
1 - la distinction entre travail social et travail privé.
Ce qui caractérise le mode de production capitaliste, c'est le fait que la production est issue de producteurs autonomes c'est à dire de producteurs privés.
La production résulte de la libre initiative d'entrepreneurs qui prennent leurs décisions sur la base d'anticipation et de calculs individuels et donc à leurs risques et périls.
En effet, parce qu'il est impossible de savoir à l'avance ce dont la société a besoin, chaque entrepreneur engage une sorte de pari lorsqu'il décide de produire tels biens en telles quantités.
Dans ces conditions, la dépense de travail que chaque travailleur met en oeuvre a, au départ, un caractère privé et non pas social. Par travail social, on entend le travail nécessaire à la reproduction de la société, autrement dit le travail que la société considère comme utile.
Dans le mode de production capitaliste, le travail privé acquiert son caractère social en faisant la preuve de son utilité pour la société, et ceci dans la mesure où les produits du travail trouvent acheteurs sur le marché, c'est-à-dire s'échangent contre la monnaie.
Ainsi, dans le mode de production capitaliste, le travail dépensé dans la production n'a, à priori, qu'un caractère privé, et il ne devient social qu'à posteriori, sous la forme de l'échangeabilité du produit du travail c'est-à-dire la capacité du produit du travail privé à s'échanger contre la monnaie.
Cette capacité à échanger s'appelle la valeur du produit du travail. Elle désigne, chez Marx, une forme du travail social que prend le travail social dans le mode de production capitaliste. Cette forme est celle de l'échangeabilité du produit du travail.
La valeur indique dans quelle mesure le travail privé a été validé par la société, ou encore dans quelle proportion le travail privé s'est converti en travail social. Plus En d'autres termes, la valeur indique la quantité de travail social que représente le produit d'un travail privé. Elle correspond donc à la part de travail social, et donc à la part de la production de la société, qui revient à chaque producteur privé.
C'est cette propriété d'être valeur qui définit le concept de marchandise chez Marx.
Tout d'abord, la marchandise n'est pas synonyme d'objet utile. En effet, une marchandise est un objet utile mais tout objet utile n'est pas marchandise.
La marchandise n'est pas non plus synonyme de produit du travail. En effet, une marchandise est un produit du travail mais tout produit du travail n'est pas marchandise.
La marchandise n'est pas une chose, un objet d'usage ou un produit du travail mais c'est un rapport social qui caractérise la production marchande, c'est-à-dire une société dans laquelle la production est le fait d'entrepreneurs privés.
2 - la distinctions entre travail abstrait et travail concret.
Marx analyse la valeur comme l'utilité d'une substance sociale et d'une forme matérielle. Chez Marx, la substance sociale de la valeur est pensée sous le concept de travail abstrait.
Le travail abstrait ne désigne pas le travail sous son aspect physique ou matériel. Ce n'est pas le travail comme on l'entend couramment, c'est-à-dire le travail en tant qu'activité technique donnant naissance à un objet d'usage déterminé, ou encore le travail comme force productive.
Pour Marx, le travail abstrait désigne le travail saisi par son aspect social, c'est-à-dire le travail qui exprime des rapports sociaux déterminés. Le travail abstrait, c'est le travail qui reproduit les rapports marchands, ou encore le travail nécessaire à la reproduction de la société capitaliste. Il désigne la forme que prend le travail social dans le mode de production capitaliste. On peut dire que toute la spécificité et toute la différence entre l'analyse marxiste de la valeur et celle de Ricardo réside dans la compréhension du double caractère du travail producteur de marchandise : travail concret d'une part et travail abstrait d'autre part.
On peut schématiser l'analyse de Marx de la façon suivante :
F.PROD TRAVAIL CONCRET ® VALEUR D'USAGE
I I
TRAVAIL ® MARCHANDISE
I I
RSP TRAVAIL ABSTRAIT ® VALEUR
F.PROD = Force productive RSP = Rapport social de production.
À partir de ce schéma, on observe que :
- la valeur n'a rien à voir avec le travail comme on l'entend couramment, c'est-à-dire le travail comme activité technique de production. En effet, la valeur ne conserne que le caractère social du travail, c'est-à-dire le travail dans la mesure où il exprime des rapports sociaux de production. Contrairement à ce que peut laisser penser la théorie Ricardienne de la valeur travail, ce n'est pas le travail en soi qui donne naissance à la valeur. Ce qui crée la valeur, ce sont les relations sociales dans lesquelles le travail est mis en oeuvre.
- c'est pourquoi, le travail abstrait qui est la substance de la valeur, est qualifié de substance sociale. Or, en tant que réalité sociale, le travail ne peut être qu'abstrait au sens où il ne s'agit pas d'une réalité visible, palpable. Il ne s'agit pas de quelque chose qui peut être appréhendé par les sens, il s'agit, d'après Marx, d'une existence imaginaire du travail, existence uniquement sociale qui n'a rien à voir avec la réalité matérielle du travail. Malgré cela, le travail abstrait, comme tout rapport social, a néanmoins une forme de manifestation matérielle. Il s'agit de la monnaie.
Autrement dit, le mode d'existence, la réalité concrète du travail abstrait, c'est la monnaie.
B. La forme d'expression de la valeur et le concept de la monnaie.
1- Polarité entre les marchandises et les monnaies.
Le point de départ de l'analyse de la forme d'expression de la valeur est la distinction que fait Marx entre la valeur et la valeur d'échange des marchandises.
Dans sa théorie de la valeur-travail, Ricardo parle indifféremment de la "valeur" ou de la "valeur d'échange" définie comme rapport d'échange entre les marchandises.
On peut schématiser le principe de la valeur d'échange de Ricardo.
Considérons le rapport d'échange entre 2 marchandises : le blé et le fer.
VALEUR D'USAGE VALEUR D'USAGE
I I
x quintaux de blé = y tonnes de fer
I I
VALEUR D'ECHANGE VALEUR D'ECHANGE
Pour Ricardo, la valeur d'échange du blé et du fer ne dépend pas de leurs valeurs d'usageEn effet, pour Ricardo, la valeur d'échange des marchandises ne dépend pas de la valeur d'usage de ces marchandises.
La valeur d'usage doit donc être écartée de l'analyse de la valeur d'échange. Toutes les marchandises ont en commun d'être des produits du travail et leurs valeurs d'échange a pour seule cause le travail qui est nécessaire à leur production.
C'est ce que Ricardo appelle aussi : le travail incorporé.
Il résulte de cette analyse que la monnaie n'est pas essentielle à l'échange des marchandises. L'échange marchand est fondamentalement un échange des marchandises entre elles, c'est à dire un échange réel.
Pour Ricardo, la monnaie est une marchandise comme les autres et le rapport de la marchandise à la monnaie est pensé comme rapport à l'autre marchandise.
La théorie de Marx est totalement différente. En effet, pour Marx, la valeur d'échange n'est pas la valeur. La valeur d'échange est la forme de la valeur au sens de forme d'expression de la valeur. La valeur d'échange d'une marchandise est l'expression de la valeur de la marchandise dans la forme de valeur d'usage d'une autre marchandise.
Exemple :
Marx considère deux marchandises : de la toile et un habit, puis il pose l'équation suivante : 20 mètres de toile = un habit.
Pour Marx, cette expression est la forme de la valeur de la toile. Elle signifie que la valeur de 20 mètres de toile s'exprime dans 1 habit en tant que valeur d'usage.
Dans cette équation, il est essentiel de comprendre que la toile et l'habit tiennent des rôles tout à fait différents. La toile exprime sa valeur dans l'habit, tandis que l'habit sert de matière à l'expression de la valeur de la toile. L'habit n'exprime pas sa valeur et il intervient dans la relation uniquement comme valeur d'usage, tandis que la toile de peut exprimer sa valeur que de façon relative, c'est-à-dire en laissant de côté sa valeur d'usage.
Travail concret ® V d'usage V d'usage ¬ T. concret
I I I I
Travail ® 20 m de toile = 1 habit ¬ Travail
I I I I
Travail abstrait ® Valeur Valeur ¬ T abstrait
Forme relative Forme équivalente
On voit clairement que cette relation n'est pas une relation symétrique mais que c'est une relation qui lie les deux pôles c'est-à-dire deux éléments qui s'opposent et se supposent à la fois, autrement dit deux éléments qui s'excluent et qui sont néanmoins inséparables.
Pour marquer cette relation qualifiée de polaire (ou encore de polarité), Marx va distinguer le terme de gauche qu'il qualifie de "forme relative" et le terme de droite qu'il qualifie de "forme équivalente".
On peut compléter le schéma en faisant intervenir le travail qui est à la fois producteur de la toile et de l'habit. Le travail producteur de marchandise a un double aspect :
- le travail concret est celui qui donne naissance à la valeur d'usage,
- le travail abstrait est celui qui donne naissance à la valeur.
Du côté de la toile: comme la valeur d'usage de la toile n'intervient pas dans la relation, le travail concret qui donne naissance à la valeur d'usage de la toile n'intervient pas non plus dans la relation.
Du côté de l'habit: comme la valeur de l'habit n'intervient pas dans la relation, le travail abstrait qui donne naissance à cette valeur de l'habit n'intervient pas non plus dans cette relation.
À partir de là, Marx dégage trois propositions :
- une valeur d'usage : dans l'exemple, l'habit devient la forme d'expression de la valeur de la toile.
- un travail concret : dans l'exemple, le travail concret qui produit l'habit devient la forme de manifestation du travail abstrait qui produit la valeur de la toile.
- il s'ensuit alors qu'un travail privé devient la représentation d'un travail social.
C'est cette relation de polarité qu'est la forme de la valeur, qui est à la base de la polarité entre les marchandises et la monnaie.
En effet, d'après Marx, on peut représenter la relation entre les marchandises et la monnaie de la façon suivante :
On place en position de forme relative (à gauche) toutes les marchandises:
20 mètres de toile ü
un habit ú
x quintaux de blé ý = 1 gr d'or = 100 F
y tonnes de fer ô
un mouton , …. þ
Équivalent général
La forme équivalente (à droite) est l'or.
Toutes les marchandises expriment leurs valeurs de façon relative dans la forme de valeur d'usage d'une marchandise exclusive qui fonctionne comme équivalent général.
Historiquement, dans le mode de production capitaliste, l'équivalent général s'est fixé sur l'or.
Si, par convention, on donne à un gramme d'or la dénomination de 100 F, on aura alors le prix de la marchandise.
La forme de la valeur conduit à désigner, au sein du monde des marchandises, l'une d'entre elles à la fonction d'équivalent général. C'est la monnaie.
La monnaie est exclue du monde des marchandises et de vient la forme polaire des marchandises, lesquels n'existent que dans cette opposition. Cela signifie qu'il n'y a pas de marchandises sans monnaie.
Contrairement à l'analyse Ricardienne, l'analyse marxiste s'interdit de concevoir l'échange marchand comme un échange des marchandises entre elles.
Pour Marx, les marchandises sont d'emblée monétaires et il n'y a pas d'échange réel marchandises-marchandises.
Pour Marx, c'est donc une erreur de dire que la valeur s'exprime dans le travail abstrait et que sa grandeur se mesure en temps de travail. Au contraire, pour Marx, ce travail abstrait s'exprime sous forme de valeur et c'est la mesure du temps de travail qui s'exprime sous forme de la grandeur de la valeur. Tandis que la valeur s'exprime en monnaie, la mesure de sa grandeur s'exprime en quantité d'équivalent général.
Cela revient à dire que la valeur ne peut être saisie que sous sa forme monétaire et qu'il n'existe pas d'autre manière d'appréhender la valeur que sous la forme du prix.
2- fonctions et formes de la monnaie.
L'analyse des formes de la valeur doit être complétée par l'analyse des formes de la monnaie, liée à ses différentes fonctions.
Les fonctions des formes de la monnaie sont au nombre de 4 :
FONCTIONS FORMES
Étalon des prix Unité de compte
Moyen de circulation Numérique
Réserve de valeur Trésor
Moyen de paiement Monnaie de crédit
La monnaie fait fonction d'étalon des prix en tant que poids déterminé d'or, pris comme unité monétaire nationale.
On dira que : x grammes d'or = 1 franc.
La monnaie prend la forme d'unité de compte ou encore de monnaie de compte.
- elle fait circuler les marchandises à travers des opérations de vente et d'achat, et la circulation des marchandises peut s'écrire : M - A - M'.
A - M' désigne l'achat de la marchandise grâce à la somme d'argent A.. Cette fonction des moyens de circulation exige le monnayage, c'est-à-dire l'émission de monnaie légale : le numéraire ou encore l'ordre monnayé.
La monnaie peut prendre la forme de pièces d'or frappées, mais aussi des formes dématérialisées, c'est-à-dire symboliques telles que la monnaie de papier.
- elle fait fonction de réserve de valeur lorsqu'elle est retirée de la circulation pour être thésaurisé. La monnaie prend alors la forme de trésor.
- elle fait fonction de moyen de paiement lorsqu'elle est utilisée pour solder une créance. En effet, les marchandises peuvent s'acheter et se vendre à crédit. Dès lors, l'acheteur devient débiteur, le vendeur devient créancier et la monnaie avec laquelle le débiteur règle le créancier fonctionne comme moyen de paiement.
Avec ses créances qui anticipent le versement de moyens de paiement, il devient possible aux producteurs de marchandises d'acheter avant de vendre, c'est-à-dire que le mouvement A - M' va précéder le mouvement M - A. C'est ce qui va permettre le développement de la monnaie de crédit. Ce mode de crédit désigne un système hiérarchisé de monnaie.
Il s'agit d'un système pyramidal comportant trois niveaux :
Monnaie
émise
par l'Etat
Crédit bancaire
Crédit commercial
La base du système est constituée par les traites, c'est-à-dire le crédit commercial que les producteurs marchands s'accordent entre eux. Ces traites peuvent être monétisées par les banques commerciales selon une procédure appelée "escompte des traites" c'est-à-dire que, en contrepartie des traites que les banques commerciales prennent en pension, les banques vont avancer aux producteurs marchands des moyens de paiement sous forme de chèques bancaires.
Comme il s'agit ici d'une monnaie de crédit émise de façon privée par les banques, cette monnaie ne fonctionne comme moyen de paiement que dans les relations entre clients d'une même banque. Elle n'est plus valable dans les relations avec une autre banque, laquelle peut exiger la monnaie dite à court légale, c'est-à-dire la monnaie émise par l'État.
C'est pourquoi, au sommet de la pyramide, on retrouve l'État, et plus précisément la Banque centrale. En effet, c'est à la Banque centrale qu'il appartient d'assurer la convertibilité des différentes monnaies bancaires selon la procédure de l'escompte des traites. En prenant en pension les traites, la Banque centrale va avancer aux banques commerciales des moyens de paiements légaux nécessaires pour boucler le circuit de la monnaie de crédit, c'est-à-dire des moyens de paiement émis à titre privé.
C. Contrainte monétaire et possibilité de crises
1°) La polarité entre le crédit et la monnaie.
La caractéristique de la production marchande est que les travaux engagés, de façon privée, doivent faire la preuve de leur caractère social, c'est-à-dire de leur utilité pour la société. La validation sociale des produits du travail privé s'exprime dans la contrainte monétaire, c'est-à-dire dans la nécessité absolue pour les marchandises de se convertir en monnaie. C'est ce qui est exprimé par le mouvement M-A, que Marx qualifie de "saut périlleux de la marchandise".
Si la marchandise ne réussit pas sa reconversion en argent, c'est-à-dire s'il y a mévente de la marchandise, alors le travail privé ne peut se transformer en travail social. La non- socialisation des travaux privés signifie l'échec du pari du producteur marchand. Or, lorsqu'une marchandise ne peut pas se vendre, la circulation M-A-M' peut s'interrompre et provoquer une réaction en chaîne, c'est-à-dire la mévente des autres marchandises.
D'autre part, on sait que l'argent peut sortir de la circulation pour être thésaurisé et que cela peut aussi provoquer la mévente des marchandises et, par conséquent, la rupture du mouvement M-A-M'.
Enfin, l'argent peut fonctionner comme moyen de paiement. Or, si un débiteur ne rembourse pas son créancier, il peut provoquer une réaction de non-remboursement en série. On voit donc que ce que l'on appelle la polarité entre les marchandises et la monnaie inclut la possibilité des crises. L'intervention de la monnaie de crédit permet d'assouplir la contrainte monétaire, en différant la sanction sociale du marché. Toutefois, cela ne peut pas supprimer la nécessaire validation sociale des travaux privés, c'est-à-dire l'échange de la marchandise contre la monnaie (mouvement M-A ).
En effet, lorsqu'une banque commerciale accorde un crédit à un producteur marchand, cela signifie que la banque anticipe la validation sociale des marchandises produites. La banque fait le pari que les marchandises pourront s'écouler et que le producteur marchand pourra rembourser la banque.
En faisant cela, la banque effectue une ante-validation privée des travaux privés, dans la mesure où tout d'abord il y a validation privée car la validation résulte d'une décision privée de la banque commerciale qui accorde un crédit au producteur de marchandises, et qu'ensuite, il s'agit d'une ante-validation puisque la validation que fait la banque a lieu avant la validation sociale du marché.
Dans le cas où il y a une mévente des marchandises, la crise prend une forme déflationniste, dans la mesure où elle se manifeste par une dépréciation des marchandises et par l'insolvabilité des banques.
Par contre, si les banques commerciales ont la possibilité de se retourner vers la Banque centrale comme "prêteur en dernière instance", la socialisation des travaux privés prend alors la forme de la convertibilité de la monnaie bancaire en monnaie étatique.
Par cette conversion de crédit bancaire en monnaie étatique, la Banque centrale valide les anticipations des banques commerciales et donc des producteurs privés. Cette émission de moyens de paiement officiels n'en reste pas moins une pseudo validation sociale des travaux privés. Il s'agit d'une validation sociale dans la mesure où la validation faite par la Banque centrale, c'est-à-dire par l'État, se fait au nom de la société. Mais il s'agit en fait d'une pseudo validation puisque la validation sociale effective demeure celle du marché. En cas de mévente de marchandises, la crise prend alors une forme inflationniste, c'est-à-dire qu'elle se manifeste par une dépréciation de la monnaie étatique, ou par une augmentation générale des prix.
On peut donc dire que, dans tous les cas, les crises monétaires rappellent au crédit son caractère privé, et donc, son caractère polaire à la monnaie. Derrière le rapport entre la monnaie bancaire privée et la monnaie de la Banque centrale, on retrouve la polarité des marchandises et de la monnaie.
2°) contrainte monétaire et régimes monétaires
Il résulte de la polarité entre les marchandises et la monnaie, que la contrainte monétaire ne peut être supprimée par un changement de régime monétaire, notamment lorsque l'on passe du régime de l'étalon or, c'est-à-dire du régime où la monnaie est convertible en or, à un régime de la monnaie dit "à cours forcé", c'est-à-dire un régime où la monnaie n'est plus convertible en or.
En effet, l'adoption d'une monnaie à cours forcé signifie que c'est à l'État d'organiser la solvabilité du système bancaire, notamment par la réglementation des conditions d'émission de la monnaie par la Banque centrale et des conditions de convertibilité des monnaies bancaires privées.
Ce qui distingue la monnaie convertible en or et celle qu'il ne l'est pas, c'est que dans le régime de la monnaie convertible, la banque commerciale porte la relation de crédit, c'est-à-dire la relation M-A, à la place du créancier du producteur marchand.
Exemple : Prenons un producteur de tables qui achète du bois et des clous à un autre producteur. Comme la transaction se fait à crédit, le producteur qui achète est donc débiteur et le producteur qui vend devient son créancier.
Pour régler cet achat, le producteur débiteur signe une traite au producteur créancier, pour reconnaître qu'il a une dette envers lui.
Dans un second temps, le producteur créancier peut avoir un besoin de monnaie. Il va demander à une banque commerciale de lui avancer des moyens de paiement. Si la banque commerciale accepte d'accorder un crédit à ce producteur, elle va, en échange de cela, prendre la traite en pension.
Le circuit ne se termine pas là puisque la banque commerciale peut aussi avoir besoin d'argent. Elle s'adresse alors à la Banque centrale qui lui avance cet argent et qui prend à son tour la traite, signée par le producteur de départ, en pension.
Ce qui résulte de cette explication c'est que, lorsque le producteur créancier accepte la traite signée par le producteur débiteur, il fait le pari que ce producteur débiteur pourra vendre ses tables.
De la même façon, lorsque la banque commerciale accepte d'apporter un crédit au producteur créancier, elle fait le pari que les anticipations de ce producteur créancier sont correctes. Elle fait un pari sur un pari.
Et, lorsque la Banque centrale accepte d'apporter des moyens de paiement à la banque commerciale, elle fait le pari que les anticipations de la banque commerciale sont correctes. Elle fait donc un pari sur un pari, lui-même fait sur un pari.
La contrainte monétaire (c'est-à-dire, la nécessité absolue de vendre les marchandises qu'on a produit) , qui devait être supportée, au départ, par celui qui produit les tables est successivement supportée par le producteur fournisseur, puis par la banque commerciale, et enfin par la Banque centrale.
On voit donc que la contrainte monétaire se fait selon un enchaînement.
Dans le cas d'un régime monétaire convertible, la contrainte monétaire ( M-A) est supporté par la banque commerciale à la place du producteur créancier, tandis que
dans un régime à monnaie non convertible, c'est la Banque centrale qui, en dernière instance, porte la relation ( M-A), c'est-à-dire la contrainte monétaire.
Producteur marchand ( débiteur) ® Producteur marchand ( créancier)
¯
Banque centrale ¬ Banque commerciale
La distinction entre les deux régimes monétaires réside seulement dans les règles différentes qui réglementent les rapports entre la Banque centrale et les banques commerciales, c'est-à-dire entre la monnaie étatique et la monnaie de crédit qui est la monnaie émise à titre privé par les banques.
III - Le rapport salarial.
A. La transformation de l'argent en capital. Rapport d'échange et rapport de classe.
1) Plus-value, valeur d'usage et valeur d'échange de la force de travail.
Nous avons vu que la formule de la circulation des marchandises, ( M-A-M' ), c’est à dire vendre pour acheter, n'a un sens que si M et M' ont des valeurs d'usage différentes. En effet, on ne va pas vendre une marchandise pour racheter la même marchandise.
À côté de cette circulation des marchandises, on rencontre, dans le mode de production capitaliste, une autre circulation A-M-A', c'est-à-dire acheter pour vendre, formule qui n'a de sens que si A et A' se différencient quantitativement et, plus précisément, si A' >A, ou encore, A' = A + DA. C'est la formule de la circulation du capital et DA est ce que Marx appelle la plus-value, ou sur-value. Par capital, on désigne donc ici la valeur qui s'accroît d'elle-même, ou qui s'autovalorise.
Comment la formule A-M-A' est-elle possible ? D'où provient la plus-value ?
Cette plus-value naît-elle de l'échange marchand ?
Il est clair que si les marchandises s'échangent à leurs valeurs, ce qui est le principe de l'échange marchand, alors il ne peut pas avoir de plus-value.
Que se passe-t-il si on suppose que les marchandises ne s'échangent pas à leur valeur ?
Exemple :Envisageons une relation d'échange dans laquelle un individu A trompe un individu B, en lui vendant une marchandise qui vaut 90 F pour un prix de 100F.
Au départ, on a la situation suivante :
l'individu A détient une marchandise qui vaut 90 F
l'individu B détient une somme l'argent de 100 F.
Le montant total de la valeur détenue par A et B est de 190 F.
Après la vente, on a la situation contraire suivante :
l'individu A détient une somme d'argent de 100 F
l'individu B détient une marchandise qui vaut 90 F
le montant total de la valeur détenue par A et B est de 190 F.
Cet exemple montre bien que la valeur totale n'a pas augmenté d'1 F. Il y a eu seulement redistribution de la valeur au profit du voleur et au détriment du volé. Aucune plus-value n'apparaît, ce qui est évident, car les voleurs n'enrichissent jamais la société.
Il est donc impossible d'expliquer la plus-value par l'échange de marchandises puisque, que les marchandises s'échangent à leur valeur ou non, cela ne crée pas de plus-value.
L'explication de la plus-value ne se trouve donc pas dans la circulation des marchandises, ni dans le mouvement A-M, ni dans celui A-M'.
Ceci étant, on ne trouvera pas non plus l'explication de la plus-value si on reste en dehors des rapports d'échanges qui sont la forme des rapports sociaux dans la société capitaliste. En effet, si on se situe hors de l'échange, on peut accroître la valeur par une dépense de travail supplémentaire, mais il ne s'agit pas d'une valeur qui s'accroît d'elle-même, autrement dit d'une plus-value.
Pour Marx, la transformation de l'argent en capital doit avoir lieu dans les conditions suivantes :
- le possesseur d'argent doit acheter les marchandises à leur valeur. Il doit les vendre également pour ce qu'elles valent et néanmoins retirer du processus plus de valeur qu'il n'en a avancé. Cela signifie que l'accroissement de valeur doit avoir lieu après l'acte d'achat (A-M ) mais avant l'acte de vente (M-A' ).
Cela localise l'accroissement de valeur dans l'usage de la marchandise M par son acheteur. Cet usage doit être créateur de valeur. Il faut donc qu'une des marchandises achetées ait la propriété, quand on l'utilise, d'être source de valeur. Il faut une marchandise dont la valeur d'usage est de créer de la valeur : il s'agit de la force de travail.
La force de travail ne désigne pas le travailleur, lequel ne peut pas se vendre dans le mode de production capitaliste. Elle ne désigne pas non plus le travail, lequel n'existe pas au moment de l'acte d'achat. La force de travail désigne la capacité de travail qui seule peut faire l'objet d'une vente par le travailleur et d'un achat par le capitaliste. On peut donc dire que, pour le capitaliste, la valeur d'usage de la force de travail, c'est sa capacité à créer davantage de valeur que n'en coûte son achat.
À partir du moment où la force de travail s'échange contre l'argent, elle a une valeur d'échange, c'est le salaire. Cette valeur d'échange correspond à la valeur d'échange des marchandises nécessaires à la reproduction de cette force de travail. La nature et la quantité de marchandises nécessaires à cette reproduction constituent une norme de reproduction de la force de travail qui a un caractère social et historique (Marx). Ce qui signifie que :
1) pour un pays à un moment donné, la norme de reproduction de la force de travail dépend du niveau de développement des forces productives de la société. Plus la productivité du travail social est élevée et plus la norme incorpore de marchandises.
2) pour un niveau de développement des forces productives donné, la norme de reproduction de la force de travail est fixée par le rapport des forces entre capitalistes et travailleurs salariés.
C'est la lutte des classes qui décide du maintien ou de la modification des normes, c'est-à-dire de l'incorporation ou non de nouvelles marchandises dans la norme.
À partir de là, on définit la plus-value comme la différence entre la valeur créée par la force de travail et la valeur dépensée dans sa reproduction. La plus-value est la différence entre la valeur d'usage de la force de travail et sa valeur d'échange.
L'appropriation par le capitaliste de la plus-value créée par les travailleurs salariés ne viole pas le principe de l'échange marchand. On peut dire que l'exploitation capitaliste n'est pas un vol.
En effet, le capitaliste qui achète la force de travail à sa valeur d'échange, en obtient légalement la valeur d'usage et, c'est à ce titre qu'il s'approprie le travail avec le sur-travail. La plus-value lui revient en droit. Tandis que le travailleur salarié, qui a vendu sa force de travail à sa valeur d'échange, cède donc au capitaliste, en contrepartie d'un salaire, la libre disposition de sa force de travail, c'est-à-dire son travail et donc le sur-travail. C'est ainsi qu'un rapport d'exploitation prend la forme d'un rapport d'échange. L'un dissimule l'autre.
2) le processus du capital : capital constant et capital variable
Reprenons la formule du capital pour expliciter le moment où a lieu la production de la plus-value, c'est-à-dire le processus de production.
Le schéma A-M-A' peut s'expliquer de la façon suivante :
ì Ft = Force de travail
A - M í …………………………….M’ - A’
î Mp = Moyens de production
Circulation des : Production : Circulation des
marchandises marchandises
- A-M : le capitaliste avance une somme d'argent A et achète à leur valeur d'échange des marchandises nécessaires au processus de production = force de travail + moyens de production.
- M-M' : la production où a lieu la consommation productive des marchandises achetées. La consommation productive des moyens de production est leur transformation en un nouveau produit M'. La consommation productive de la force de travail consiste dans la mise en oeuvre du travail qui est créatrice d'une valeur nouvelle, qui peut excéder la valeur d'échange de la force de travail achetée, et incorporer alors une plus-value.
- M'-A' : retour dans la circulation des marchandises. Le capitaliste vend les marchandises M' à leur valeur d'échange et réalise une plus-value.
C'est en parcourant ces trois phases que l'argent se transforme en capital, c'est pourquoi le processus du capital est l'unité d'un processus de production et d'un processus de circulation des marchandises.
On observera que dans ce processus de capital, les moyens de production et la force de travail se comportent de deux manières différentes. En effet, les moyens de production sont le produit du travail social dépensé au cours de périodes de production précédentes ; il s'agit de travail passé. C'est pourquoi les moyens de production ne font que transférer leur valeur aux marchandises produites sans ajouter de valeur nouvelle. Cette partie du capital consacrée à l'achat des moyens de production, et qui ne change pas de valeur dans le processus de production, est appelé capital constant.
Par contre, l'usage de la force de travail met en oeuvre du travail vivant et créateur d'une valeur nouvelle qui reproduit la valeur d'échange de la force de travail et incorpore un surplus : la plus-value.
Cette partie du capital avancé sous forme de force de travail et qui accroît sa valeur dans le processus de production, c'est le capital variable.
On peut alors réécrire la formule développée du capital sous la forme suivante :
ì V = capital variable
A - M í …………………………….M’ - A’ = C + ( V + Pl )
î C = capital constant
Pl = plus value
Ce processus du capital est d'une part une transmission d'une valeur existante (C.) et d'autre part, c'est une création d'une valeur nouvelle (V + Plus value ).
Observations :
Ce qui caractérise le rapport capitaliste de production, c'est-à-dire ce qui le différencie du servage ou de l'esclavage, c'est que la force de travail y est achetée et vendue : le travail devient travail salarié. Pour que le travail salarié apparaisse, il faut deux conditions :
-- le travailleur doit avoir la libre disposition de sa force de travail pour pouvoir la vendre, c'est-à-dire qu'il doit en être juridiquement le propriétaire, il ne doit donc être ni serf ni esclave.
-- le travailleur doit être contraint de vendre sa force de travail, c'est-à-dire qu'il ne doit pas posséder de moyens de production, sans quoi il vendrait le produit de son travail et non pas sa force de travail.
Le rapport salarial est donc un rapport d'échange très particulier qui lie deux classes sociales :
- d'un côté, une classe qui détient l'ensemble des marchandises, c'est-à-dire les moyens de production et les moyens de subsistance :c'est la classe des capitalistes,
- de l'autre côté, on a une classe qui ne détient aucune marchandise et qui doit donc, pour accéder aux moyens de subsistance, transformer sa force de travail en marchandise : c'est la classe des travailleurs salariés.
Cela signifie que le rapport d'échange n'est qu'une forme. C'est la forme que prend le rapport des classes sociales dans le mode de production capitaliste.